La grande majorité des médecins indépendants exerce aujourd’hui son activité en raison individuelle. Mais la transformation de ce statut en société à responsabilité limitée (Sàrl) ou en société anonyme (SA) peut offrir des avantages substantiels dès que les revenus dépassent largement les dépenses courantes. Le praticien qui se décide pour une Sàrl ou une SA devient alors employé de la structure qu’il crée.

« Ainsi, explique Tibère Roussot, expert comptable de la société fiduciaire Gespower, le médecin détermine le salaire qu’il va se verser pour couvrir ses besoins personnels, le reste allant alimenter le bénéfice de la société, qui va ainsi être capitalisée au fil des années. L’avantage de ce type d’opération est double : d’une part, les revenus non versés au titre du salaire ne sont pas soumis à des cotisations AVS ; d’autre part, le médecin ne paiera d’impôts que sur le salaire qu’il touchera. Évidemment, le bénéfice de la société sera également imposé mais à un taux nettement moindre que sur le salaire. »

« Pour donner un exemple, poursuit le spécialiste, l’impôt sur le bénéfice à Genève est actuellement d’environ 24 % (d’autres cantons ont adopté une diminution de l’imposition des sociétés), alors que le taux d’imposition marginal est de 40 % pour un salaire annuel qui dépasse les 200’000 francs. »
 

Versement de dividendes

Si le salaire ne suffit pas à couvrir certaines dépenses, le médecin propriétaire de sa Sàrl ou SA a la possibilité de se verser des dividendes. Cette opération s’avère particulièrement intéressante pour son bénéficiaire puisque, selon l’expert, «si ce dividende est considéré comme un revenu supplémentaire, il n’est cependant pas assujetti à l’AVS. En outre, les dividendes versés bénéficient d’un abattement fiscal variable selon les cantons (40 % à Genève) ». En d’autres termes, le dividende n’est imposé qu’à hauteur de 60% de sa valeur. Il faut toutefois prendre garde à ce que le rapport entre le salaire et le bénéfice soit cohérent : « Sinon, l’Administration fédérale des contributions pourrait considérer les dividendes comme des salaires, en appliquant le taux d’imposition sur le revenu correspondant. Ces montants seraient alors chargés de cotisations AVS. Cela pourrait par exemple être le cas si l’indépendant se verse un dividende chaque année ».

Cabinets de groupe

La constitution d’une SA ou Sàrl s’avère presque incontournable pour les médecins qui s’organisent en cabinet de groupe d’une certaine ampleur, à partir de quatre ou cinq praticiens, comme l’explique Bastien Aeby, spécialiste auprès de la fiduciaire Medcare support.

Ce choix peut prendre trois différentes formes selon le type de centre médical : « S’il s’agit d’un cabinet de groupe pluridisciplinaire, avec de grands écarts de revenus selon les spécialités, les médecins auront sans doute avantage à rester indépendants. Mais ils pourront tout de même créer une structure commune organisée en SA, dont ils seront actionnaires et à laquelle ils factureront leurs prestations à l’aide de leur propre RCC d’indépendant et en lui reversant une partie de leurs encaissements. Ces paiements serviront à couvrir les investissements pris en charge par la SA, mais rien de plus ».

« Ainsi, ajoute le spécialiste, et c’est l’atout fondamental de cette option, la SA dégagera très peu de bénéfices et payera donc très peu d’impôts. Par ailleurs, les médecins pourront déduire dans leur propre comptabilité commerciale les versements effectués dans la SA. Mais il y a un revers à la médaille : ces paiements seront soumis à la TVA, car il s’agit de prestations de la SA en faveur des médecins ».

Éviter la TVA

La deuxième option, c’est que la SA facture directement les prestations médicales pour le compte des médecins indépendants : « Il faut que les médecins passent un contrat de prestations avec la SA et fassent une cession de créances. La SA va utiliser le RCC du médecin indépendant pour facturer les prestations médicales. Cette solution permet d’échapper à la TVA, puisque ce type de prestations n’y est jamais soumis. L’inconvénient de cette méthode, c’est la fixation des rétrocessions à attribuer aux médecins. Il s’agit donc d’un modèle qui conviendrait plutôt à un centre médical composé de médecins dégageant des revenus plus ou moins identiques, comme des généralistes ».

Enfin, la troisième option consiste à créer une SA dont les médecins sont les employés : « Pour le médecin, l’avantage, c’est de recevoir un salaire régulier. On relèvera qu’il peut également rester indépendant et conserver le double statut s’il réalise des prestations privées en dehors de la SA, par exemple dans d’autres cliniques ».